Le nom d’Annemarie Schwarzenbach vous est probablement familier. Peut-être avez-vous lu l’un de ses livres, par exemple « La mort en Perse », l’un de ses romans les plus connus ? À moins que vous n’ayez aperçu quelques photos de son voyage épique, de Genève à Kaboul, effectué en Ford en compagnie d’une compatriote, la célèbre voyageuse et reporter suisse Ella Maillart ? Plus sûrement êtes-vous déjà tombée, quelque part sur Internet, sur l’une de ses photos, la montrant au volant d’une voiture rutilante ou dans une pose nonchalante, une cigarette ou un appareil photo à la main. Intriguée par sa beauté, sa silhouette élégante et androgyne, vous avez sans doute découvert, en quelques clics, les grandes lignes d’une existence aussi courte que tumultueuse : ses amours lesbiennes, ses voyages incessants à travers le monde, une terrible dépendance à la morphine et une mort précoce, à trente-quatre ans, des suites d’un étrange accident de bicyclette.
On peut affirmer sans crainte que la beauté d’Annemarie Schwarzenbach aura joué un rôle considérable dans sa vie, scellant son destin ainsi que la postérité de son œuvre. Partout où elle s’est rendue, Annemarie aura attiré tous les regards et bénéficié de toutes les attentions. Son visage, incroyablement photogénique, est peut-être aussi la raison pour laquelle son œuvre a été sauvée de l’oubli, à la fin des années 1980, une quarantaine d’années après son décès. Il faut bien reconnaître que les portraits d’Annemarie Schwarzenbach ont quelque chose de fascinant, peut-être à cause de son allure moderne, qui nous paraît encore aujourd’hui si séduisante, ou bien de sa beauté presque douloureuse. Ses traits tirés, parfois même émaciés, et son regard fiévreux – voire trouble – expriment une souffrance qui nous interroge et sur laquelle nous aimerions, peut-être inconsciemment, poser des mots.
Si la beauté d’Annemarie Schwarzenbach n’a rien perdu de son pouvoir de séduction, elle constitue une bien mauvaise raison de s’intéresser à sa vie et à son œuvre. D’ailleurs, si d’aventure vous vous êtes risquée à entamer des recherches plus poussées à son sujet, afin de trouver des réponses à vos questions, vos lectures vous auront peut-être laissé une impression désagréable de confusion. Beaucoup des textes qui lui sont consacrés semblent échouer à la comprendre, exprimant eux-mêmes une forme de perplexité ou d’incompréhension, se perdant dans d’interminables conjectures pour tenter d’expliquer le « mystère » de sa personnalité et de ses choix.
La figure trompeuse de l’ange
En premier lieu, j’imagine que vous êtes souvent tombée, en guise d’introduction, sur la désormais célèbre formule de Roger Martin du Gard, comparant le visage d’Annemarie à celui d’un « ange inconsolable »1. L’écrivain ne fut pas le seul à reconnaître la figure d’un ange dans la beauté irréelle d’Annemarie Schwarzenbach. « Annemarie me faisait le même effet qu’à tous les gens : un étrange mélange d’homme et de femme », raconte par exemple la photographe Marianne Breslauer, qui a voyagé à ses côtés en Espagne, en 1933 à l’occasion d’une série de reportages. « Pour moi, elle correspondait, je l’ai déjà dit cent fois, à l’image que me je faisais de l’ange Gabriel au paradis ».2
Comparer Annemarie à un ange – ces êtres parfaits et éthérés –, est une fausse piste qui la relègue d’emblée dans la catégorie des « créatures » : surnaturelles, étranges, énigmatiques et finalement un peu monstrueuses. Cet idéal de perfection inhumaine peut-il déboucher sur autre chose qu’une amère déception – d’ailleurs plutôt injuste : qui pourrait se montrer à la hauteur de telles attentes ? Dans notre société imprégnée de culture chrétienne, la figure de l’ange évoque également immanquablement la damnation, la chute et l’exil. Loin d’être un hasard, l’allusion indirecte aux anges déchus fait référence au destin funeste d’Annemarie, à sa mort précoce, que ses contemporains auraient donc pu entrapercevoir sur son visage, comme une sorte de malédiction.
Nous verrons qu’en réalité, la mort d’Annemarie n’avait rien d’inéluctable, comme l’a révélé son petit-neveu, Alexis Schwarzenbach, dans son ouvrage intitulé « Maman, tu dois lire mon livre/Annemarie Schwarzenbach, sa mère et sa grand-mère » publié en 2007. Dans ce livre sont détaillées les circonstances véritables de son décès, qui n’a pas vraiment été, comme on le croyait, causé par les blessures liées à un accident de bicyclette, aggravées par sa consommation de drogue. À la lecture du récit établi par Alexis Schwarzenbach, il apparait que la mort d’Annemarie semble plutôt avoir été la conséquence directe des traitements inhumains et complètement inappropriés qui lui ont été infligés à la suite de cette chute, en particulier par le psychiatre Oscar Forel qui avait déjà tenté par le passé de « traiter » son lesbianisme et sa toxicomanie, c’est-à-dire de la faire rentrer dans le rang à tout prix. Le nom d’Oscar Forel sera peut-être familier à certaines d’entre vous, puisqu’il est également le psychiatre qui diagnostiqua à Zelda Fitzgerald, tout comme d’ailleurs à Annemarie, une « schizophrénie », qui lui valut d’être internée et de subir des séances d’électrochocs.
Un décès suspect
Jusqu’à la sortie du livre d’Alexis Schwarzenbach, les circonstances de la mort d’Annemarie sont restées floues. L’accident de bicyclette, aussi inattendu qu’absurde, survenu en septembre 1942 entre Sils-Baselgia et Saint-Moritz, venait clore la vie et les biographies d’Annemarie avec la brutalité d’un couperet. Cette version des faits, avancée par sa famille, comportait cependant des zones d’ombre plutôt troublantes qui auraient pu (dû ?) soulever des questions. D’après le récit officiel, la chute d’Annemarie lui aurait ainsi occasionné une plaie à la tête, qui ne nécessitait pourtant pas de points de suture, une forte commotion cérébrale, mais aussi une sorte de syndrome psychiatrique : une confusion et une agitation sévères que ses médecins ne seraient pas parvenus à soigner. Ce syndrome psychiatrique – ou peut-être une encéphalopathie toxique, les médecins semblaient hésiter – aurait été une conséquence de sa toxicomanie. D’après les témoignages, sa chute l’aurait plongée dans un état second : elle ne reconnaissait plus ses proches et se serait même « traînée sur le sol comme un animal ». Après une courte hospitalisation, Annemarie a été installée dans sa maison de Sils sur ordre de sa mère et laissée, sans aucune sorte de supervision, à la merci d’infirmières qui l’auraient traitée avec « brutalité ». Elle est décédée dix semaines plus tard dans la solitude la plus absolue3.
Ce récit, construit et lissé au fil du temps par la famille d’Annemarie, semble à bien des égards étrange, voire invraisemblable. Pourtant, il n’a soulevé aucune interrogation. Les auteurices des textes consacrés à Annemarie Schwarzenbach ont préféré se concentrer sur la thèse du sort tragique et prédestiné de « l’ange inconsolable » qui repose sur deux arguments. D’abord, la dépendance à la morphine dont Annemarie souffrit durant les dix dernières années de sa vie, sans jamais parvenir à s’en libérer. Les sevrages brutaux et solitaires, les nombreuses cures de désintoxication en clinique, furent vains et toujours suivis de rechutes. Son état ne cessa de s’aggraver, jusqu’à provoquer une longue crise lors d’un séjour aux États-Unis en 1940, durant laquelle son comportement fut si erratique, et parfois même si violent, qu’il la coupa de la plupart de ses amis et soutiens. Cette période très sombre s’acheva par une arrestation par la police et un internement en hôpital psychiatrique, où lui furent infligés des traitements si brutaux qu’elle en demeura profondément traumatisée.
Un récit bourré de stéréotypes éculés
Outre la consommation de drogue, le lesbianisme est souvent associé à l’espèce d’entreprise d’autodestruction dans laquelle se serait lancée Annemarie. Si les choses ne sont jamais formulées aussi clairement, le lesbianisme et la toxicomanie d’Annemarie Schwarzenbach apparaissent comme ses deux faiblesses originelles, qui l’auraient menée à sa perte. L’ange déchue, qui ne pouvait échapper à son châtiment, aurait ainsi fini par payer ses transgressions et ses excès. Cette notion d’une punition presque divine est bien sûr directement liée à l’idée, présente encore aujourd’hui dans bon nombre d’esprits, que l’homosexualité est fondamentalement contre nature, voire perverse, tout comme d’ailleurs le refus de se conformer aux normes de genre. À l’image de Renée Vivien, qui souffrit d’une dépendance à l’alcool et au chloral et qui mourut prématurément à l’âge de trente-deux ans, Annemarie Schwarzenbach est ainsi devenue une nouvelle incarnation des « Femmes damnées », en référence au poème de Charles Baudelaire issu du recueil « Les Fleurs du mal » (1857). Les lesbiennes y sont présentées comme des pécheresses, mi-folles mi-animales, vouées aux flammes de l’enfer : « Ombres folles, courez au but de vos désirs ; / Jamais vous ne pourrez assouvir votre rage, / Et votre châtiment naîtra de vos plaisirs ». Dans cet imaginaire misogyne et lesbophobe, l’alcoolisme, la toxicomanie et la dépression ne peuvent être que des preuves supplémentaires, ou bien des conséquences, d’une dépravation morale qui finira tôt ou tard par être sanctionnée par le châtiment ultime : la mort.
Certes, Annemarie Schwarzenbach est en général dépeinte d’une façon nuancée. On salue volontiers ses idéaux humanistes : son rejet viscéral du nazisme, le sentiment de compassion et de révolte que lui inspiraient la question des inégalités sociales ou le sort des populations opprimées, ou encore ses observations fines et pertinentes, dénuées de préjugés, sur les pays qu’elle a traversés. En revanche, sa tendance à la dépression, sa toxicomanie et son errance désespérée sont considérées avec perplexité. On fait mine de s’interroger – ou pire, on s’interroge sincèrement – sur les causes de ce qui est présenté comme un curieux sabotage. Quelle pouvait bien être l’origine de ce désespoir, de cette inquiétude fébrile qui hantait Annemarie Schwarzenbach ? Pourquoi une jeune femme riche, belle et talentueuse s’est-elle jetée sur les routes dans un interminable voyage, dans une quête qui semblait avoir pour seul but une perpétuelle mise en mouvement ? D’où pouvait bien venir son mal-être ? N’était-elle pas l’héritière d’un magnat de la soie ? N’a-t-elle pas grandi dans le cadre enchanteur de la demeure familiale de Bocken, en Suisse, bénéficiant de tous les luxes et de tous les loisirs de sa classe sociale : les sports d’hiver dans des stations huppées, l’équitation, les concerts du Festival de Bayreuth ? Que fuyait Annemarie Schwarzenbach, sinon elle-même ? Quelle pouvait bien être la source de cette angoisse permanente, de cette peur de l’abandon, de cette détresse qui ne trouvera jamais d’apaisement ?
Des silences révélateurs
En réalité, il est très difficile de comprendre la trajectoire d’Annemarie Schwarzenbach si l’on refuse de reconnaître à quel point son homosexualité aura influencé, de façon directe et indirecte, son existence et ses choix. Dans les textes qui lui sont consacrés, son lesbianisme est souvent évoqué le plus succinctement possible, lorsqu’il est vraiment impossible de l’ignorer. Il est également toujours envisagé sous l’angle d’une excentricité destructrice, et jamais comme une expérience fondamentale qui aura contribué à forger ses plus grandes qualités : son courage, sa lucidité et son honnêteté. Annemarie a pourtant décrit avec beaucoup de force la prise de conscience de son homosexualité et ses répercussions dans sa nouvelle intitulée « Voir une femme », un très beau texte sur l’expérience lesbienne, malheureusement peu connu. En se plongeant dans les œuvres d’Annemarie, en se référant à ses propres mots, il devient aisé de saisir à quel point son homosexualité a joué un rôle primordial dans la construction de sa personnalité, de ses valeurs, de ses convictions politiques, de son rapport au monde et aux autres.
Si son lesbianisme a été relégué à la marge, l’homophobie dont elle a été la victime a été minimisée, voire complètement ignorée. C’est pourtant l’intolérance de sa famille qui est à l’origine de la blessure intime, profonde, qui l’a poursuivie durant toute sa vie. Annemarie n’est jamais parvenue à surmonter le traumatisme du rejet familial et est restée prisonnière d’une relation d’emprise avec sa mère, écrasante et abusive – une relation fatale à bien des égards. Cette mère qui l’aima d’un amour fusionnel, étouffant, avant de la repousser violemment, jusqu’à en arriver à souhaiter sa mort, seule issue au « problème » qu’était devenue l’existence de cette fille rebelle et incontrôlable.
Un exil involontaire
À l’intolérance de sa famille vis-à-vis de son homosexualité s’est rapidement mêlé un conflit politique et idéologique, qui s’est noué autour de son rejet intransigeant du nazisme que les Schwarzenbach ont ardemment soutenu, presque depuis la première heure. Dès 1934, pour avoir pris publiquement la défense d’Erika Mann, réfugiée à Zurich et ciblée par un groupuscule suisse d’extrême droite (dans une séquence qui, selon l’avis de la police de l’époque, aurait été orchestrée par sa mère, Renée Schwarzenbach), Annemarie devient littéralement indésirable en Suisse. Elle doit se résoudre à quitter le pays et ne pourra jamais réellement y revenir, en tout cas pas d’une façon durable et encore moins confortable. Courageusement, elle s’est efforcée de donner un sens à ses voyages, grâce à l’écriture de reportages et de romans, ce qui ne l’a pas empêchée de souffrir d’une constante nostalgie. C’est bel et bien parce qu’elle a été bannie par ses proches qu’Annemarie est devenue une exilée, à l’image de Renée Vivien, cette autre grande voyageuse compulsive qui semblait incapable de tenir en place. « Et ma grande douleur terrible, la voici : / Partout je redirai : je ne suis pas d’ici », se désolait Renée Vivien dans son poème intitulé « J’ai jeté mes Fleurs »4. Dans son ouvrage, « L’Imaginaire du féminin dans l’œuvre de Renée Vivien »5 Marie-Ange Bartholomot Bessou défend l’idée que Renée Vivien a été confrontée à différentes formes d’exils, parfois choisis et parfois imposés. Certains de ces exils sont communs à toutes les femmes qui, dans nos sociétés patriarcales, sont « victimes d’un long travail de la destruction de l’être féminin indéfiniment reconduit », conduisant chaque femme à « expérimenter pour son propre compte la permanence d’un exil intérieur très ancien »6. Exclues de l’Histoire, privées de mémoire et étrangères à elles-mêmes, elles sont « retenues prisonnières à l’intérieur d’étroites limitations, hors d’elles-mêmes et de leurs enjeux propres »7. Toutes les femmes – et parmi elles, les lesbiennes – qui transgressent ces limitations et refusent le rôle qui leur est dévolu sont sujettes au rejet et à la violence, comme le rappelait Renée Vivien dans son poème « Enseignement », dans lequel elle déplorait que les « sorcières », ces femmes déviantes et rebelles, soient partout traitées comme de « maudites étrangères », craintes, chassées et haïes8.
Annemarie aura bénéficié durant ses voyages de privilèges qui ont pu paraître exorbitants, notamment aux yeux de certains de ses amis, dans le contexte de l’arrivée au pouvoir des nazis en Allemagne, puis du déclenchement de la Seconde Guerre mondiale. Elle jouissait, en plus de moyens financiers confortables, d’une totale liberté de mouvement grâce à un passeport diplomatique obtenu à la suite de son mariage éphémère avec le diplomate français Claude Clarac. Au même moment, des millions de personnes se retrouvaient prisonnières des frontières de leur propre pays et victimes de persécutions impitoyables. Si les voyages d’Annemarie lui ont permis d’échapper à toutes sortes de dangers – et tout simplement de rester en vie, ce qui n’était pas une mince affaire durant la Seconde Guerre mondiale – elle ne trouvera que des refuges temporaires où, poursuivie par ses démons, elle sera souvent en proie au désespoir. Le monde, pourtant plus accessible que jamais grâce aux moyens de locomotion modernes, n’offre aucune issue de secours. Seule l’écriture, qui l’accompagnera toute sa vie, lui apportera un peu de réconfort, cependant sur un plan plus symbolique et moral que matériel (telle la mystique Mytilène, « l’île chimérique », si chère à Renée Vivien), puisque beaucoup de ses textes ne trouveront jamais d’éditeurs.
Malgré ses doutes sur ses qualités d’écrivaine, qui l’auront souvent torturée, l’écriture aura été pour Annemarie un soutien constant qui aura donné un but à son existence ou qui, du moins, lui aura donné suffisamment de force pour continuer à vivre. Dans un article consacré à la romancière américaine Carson McCullers, rencontrée en juin 1940 à New York, Annemarie évoque sa vision de la « difficile mission de l’écrivain, mission jamais pleinement accomplie, jamais libératrice, toujours torturante ». Cette mission noble, difficile et âpre, devient au fil des années de plus en plus désespérée, jusqu’à se transformer en une « détresse de vivre seulement pour pouvoir dire la vie, sur la détresse de devoir vivre pourtant »9.
L’écriture comme vocation
Annemarie Schwarzenbach a toujours eu un rapport viscéral, passionné, à l’écriture, qui fut pour elle une véritable vocation. Elle la considérait comme « sa seule profession »10, allant même jusqu’à affirmer, dans une lettre à son ami Klaus Mann, qu’elle n’était « bonne qu’à cela »11. Dans le domaine de la fiction, l’écriture aura été un refuge ainsi qu’un mode d’exploration et de sublimation de ses déchirements intérieurs. Elle s’apparente à une expérience presque mystique, entre la transe et la révélation, qui se transforme volontiers en lutte, avec les mots et avec son corps, souvent malade, fiévreux, en proie au manque.
Les mains [d’Annemarie] étaient celles d’un artisan patient qui sait ciseler une ligne pure : je l’ai vue placer successivement sept feuilles blanches dans la machine à écrire avant qu’un paragraphe ait atteint le dessin aisé et parfait qui pouvait la satisfaire. Écrire était le seul rite de sa vie : elle y subordonnait tout
« La Voie Cruelle », Ella Maillart, Ed Payot, 1991, p.25
En 1925, à l’âge de dix-sept ans, Annemarie a déjà une idée assez précise de l’orientation qu’elle souhaite donner à son style d’écriture qui, d’un roman à l’autre, prend de plus en plus la forme d’une prose lyrique : « Dans la musique il n’y a aucun événement, et pourtant elle nous bouleverse. J’aimerais écrire un livre que l’on pourrait lire à voix haute, très lentement, et où chaque phrase, même incohérente, serait musicale et belle »12. Cette évolution lui semble à la fois inévitable, mais aussi risquée, car susceptible de devenir de plus en plus inaccessible aux lecteurs. « Je ne pouvais pas écrire autrement », écrit-elle au sujet de son livre « La Vallée Heureuse », « Faire aucune concession, songer ni au style ni au récit, mais seulement m’absorber dans une concentration et sincérité absolues (…) En ce moment je devrais préparer un livre avec photos sur le voyage (…) Et je retrouve dans mon effort et dans chaque page terminée le même rythme, le même style dangereux »13. La difficulté qu’elle rencontrera à faire publier ses œuvres semblera confirmer cette crainte, qui la mènera à penser, dans certains moments de désespoir, que ses écrits n’étaient peut-être destinés qu’à elle seule14. Pour autant, elle ne renoncera jamais à l’écriture.
« Je commence à comprendre, oui, durant un instant je comprends que ma langue ne doit pas être comprise ! – Je ne veux aucune audience, mes chants doivent se perdre, aucun oracle ne doit me répondre, aucun mystère d’Éleusis ne doit m’être révélé, la fumée de mes sacrifices ne doit pas s’élever. Plus de sacrifices, plus d’autels, plus d’hymnes – je m’approche du silence de la créature. »
« la Vallée Heureuse », Annemarie Schwarzenbach, éd. de l’Aire, 1991, p.77
Les reportages
À côté de ses romans et de ses nouvelles, Annemarie Schwarzenbach s’est beaucoup consacrée à un autre genre littéraire : le reportage. Si ses œuvres de fiction sont essentiellement tournées vers son univers intérieur, ses reportages constituent un mode de communication avec le monde extérieur, voire le monde entier. Entre 1933 et 1942, Annemarie aura écrit environ 300 reportages (en Europe, aux États-Unis, en Afghanistan, Iran, Congo…) et pris plus de 3 000 photos. Ces textes, d’un style à la fois poétique et très vivant, demeurent aujourd’hui passionnants à lire, en raison du point de vue adopté par Annemarie qui leur confère une grande modernité. Quel que soit le pays ou la situation qu’elle décrit, son regard ne se fera jamais surplombant, pas plus qu’elle ne tentera de se plier à la prétendue objectivité du reporter. À tel point que certains de ses papiers suscitent la perplexité des rédacteurs en chef des journaux pour qui elle travaille, qui cherchent plutôt à satisfaire les envies d’exotisme de leurs lecteurs15 – comme le rédacteur en chef de la « Thurgauer Zeitung » qui écrivit, au sujet de ses articles sur les États-Unis : « J’avais espéré recevoir d’A. Clark [le pseudonyme d’Annemarie] des articles sur les réalités de l’Amérique ; au lieu de cela elle m’a envoyé des textes dans lesquels elle décrit surtout des sentiments personnels (…) j’espère que les articles d’Alaska répondront mieux à notre demande d’informations objectives »16.
Annemarie se positionne clairement dans ses articles, dans lesquels ses opinions politiques transparaissent sans ambigüités. Certains de ses reportages, trop ouvertement antinazis, ne seront d’ailleurs jamais publiés. À quelques reprises, elle doit aussi se résoudre à une forme d’autocensure, afin de vendre ses papiers, comme lors de son voyage au Portugal en 1941, alors que le pays est soumis à un régime dictatorial dirigé par Antonio de Oliveira Salazar17.
La question du point de vue
Le point de vue d’Annemarie Schwarzenbach est celui d’une jeune voyageuse européenne, historienne de formation, habitée par une insatiable soif de connaissance, mais aussi préoccupée en permanence par l’actualité. La séquence d’événements qui, de 1933 à 1939, virent l’accession au pouvoir d’Hitler, puis le déclenchement de la Seconde Guerre mondiale et les premières victoires nazies, est pour elle une source d’inquiétude constante. Annemarie voit en l’Europe une entité politique unissant des peuples qui partagent une culture et une histoire commune. Elle redoute une destruction définitive de l’esprit européen, des valeurs humanistes et de l’idéal démocratique sous la botte des fascistes et de leur ordre brutal, sanguinaire et hypocrite. Très empathique, elle est accablée par les souffrances des opprimés et des persécutés et se pose sans cesse la question de la responsabilité individuelle. Elle cherche une façon de participer à la lutte et est souvent rongée par un sentiment d’impuissance de culpabilité. Ses reportages, en Europe notamment, deviennent alors un moyen de témoigner et de donner la parole aux exilés et aux opprimés.
Le statut social d’Annemarie Schwarzenbach lui a permis d’échapper à certaines violences. Grâce à la fortune de sa famille, elle a pu voyager dans le monde entier et fuir la guerre, ses bombardements et ses atrocités. Elle n’a pas été, comme ses amis Klaus et Erika Mann – figures de la résistance intellectuelle au nazisme – menacée de persécution, de déportation et d’assassinat. Mais ses privilèges, par ailleurs indéniables, n’ont pas suffi à la protéger de toutes les violences et en premier lieu celles subies dans le huis clos familial. À l’âge adulte, son lesbianisme, qu’elle a refusé de refouler et de dissimuler, et sa non-conformité aux normes de genre ont fait d’elle une sorte de créature dérangeante, anormale. Sa beauté a rendu son apparence – « l’étrange mélange d’homme et de femme » – supportable, voire fascinante, aux yeux de la société hétéropatriarcale, mais Annemarie incarnait malgré tout une différence inacceptable, dangereuse. Celle d’un « personnage sorti d’un conte de fée »18, à la frontière du monstrueux, qui n’a, en tout état de cause, pas sa place dans la société humaine. Sa dépendance à la morphine l’a ensuite mise à la merci des médecins qui, au lieu de soigner son addiction, se sont acharnés à tenter de la « réformer », de corriger ses « déviances ». Sa consommation de drogues, son lesbianisme et son rejet de l’autorité, considérés comme autant de symptômes, ont justifié le recours à des « traitements », aussi violents et inutiles que dangereux, comme des électrochocs ou des chocs d’insuline, qui ont fini par provoquer sa mort.
À la recherche de la vérité
Annemarie est aux antipodes de la figure inhumaine et à peine incarnée d’un ange. Loin d’observer le monde avec indifférence, depuis son nuage, elle a au contraire pleinement vécu le fracas et la fureur de son époque. Le glamour de ses portraits photographiques, qui ont tendance à la transformer en héroïne de papier glacé, chic et intemporelle, est tout aussi trompeur. Durant sa vie, Annemarie a bénéficié des conditions de vie les plus luxueuses de la haute société européenne, mais a aussi enduré de terribles souffrances physiques et morales. Elle n’a été frappée d’aucune malédiction ou punition divine, mais a souffert aux mains d’autres êtres humains avec qui, pourtant, elle se sentait unie par une communauté de destin et un sentiment de fraternité.
Il est plus que temps d’en finir avec le discours de « l’ange inconsolable » et de reconnaître qu’Annemarie Schwarzenbach a connu un sort terrifiant et subi des violences caractéristiques pour les femmes de son époque. Dans la première moitié du XXe siècle, des diagnostics expéditifs allant de la « névrose » à la « schizophrénie » se sont substitués au concept d’hystérie né au siècle précédent. Ils ont servi de prétextes à l’enfermement d’un grand nombre de femmes auxquelles ont été infligés des traitements qui ressemblaient furieusement à des tortures et qui provoquaient des séquelles physiques et psychiques considérables, parfois irréversibles. L’alcoolisme, la toxicomanie, le recours à la prostitution, l’homosexualité, ou tout simplement la rébellion, le désir de liberté, la dépression – ou toute autre manifestation des traumatismes causés par la violence patriarcale – ont été considérés comme des symptômes d’une folie féminine que la médecine était chargée de soigner, mais surtout de contrôler. Citons, parmi d’innombrables cas, l’exemple de Camille Claudel, internée en 1913 à l’instigation de son frère Paul dans un asile ou elle restera enfermée jusqu’à sa mort, trente ans plus tard, ou celui de Rose Marie Kennedy (1918-2005) qui a subi à l’âge de 23 ans, à la demande de son père, une lobotomie censée la guérir de prétendus « troubles de l’humeur » – en réalité, un goût jugé trop prononcé pour la fête et les liaisons masculines –, qui la laissera totalement dépendante, incapable de s’exprimer ou de se mouvoir.
Il existe beaucoup d’exemples d’artistes nées dans la première moitié du XXe siècle qui ont été internées et « soignées » par électrochocs : Dora Maar, Zelda Fitzgerald, Sylvia Plath, Leonora Carrington ou encore Niki de Saint-Phalle. Annemarie Schwarzenbach, qui n’y aura pas survécu, rejoint ainsi la triste cohorte des femmes, célèbres ou anonymes, rendues en partie responsables de leur propre mort, lente et programmée, souhaitée par la société tout entière et bien souvent hâtée par leurs proches ou leur famille, avec la complicité du corps médical.
Revenir aux sources
Face à ces violences, Annemarie a oscillé entre révolte et résignation. Dans son œuvre, à travers l’écriture, elle n’a cependant jamais renoncé à lutter. Elle s’est engagée contre le nazisme avec ses moyens limités, en s’efforçant de diffuser ses valeurs humanistes. Malheureusement, elle n’a jamais été prise au sérieux et n’a cessé d’être marginalisée. À sa mort, sa mère, Renée Schwarzenbach et sa grand-mère, Clara Wille, ont détruit sa correspondance et ses journaux intimes par pure homophobie, afin qu’il n’en reste aucune trace, mais grâce à la prévoyance d’Annemarie, ses œuvres, dont la responsabilité a été confiée par testament à Anita Forrer, ont été sauvegardées. Pour espérer comprendre sa personnalité complexe, qui n’est d’ailleurs pas dénuée de zones d’ombre, il nous faut résolument ignorer à peu près tout ce qui a déjà été écrit à son sujet et revenir à la source : ses textes. C’est en lisant, en relisant ses mots et en s’attardant parfois entre les lignes qu’il devient possible d’appréhender le drame de sa destinée brisé. Et peut-être aurez-vous la surprise de vous découvrir des points communs avec Annemarie, dont certaines des réflexions et des angoisses vous paraîtront malheureusement familières. Car Annemarie Schwarzenbach a vécu dans un monde au bord du gouffre et de l’anéantissement, qui nous semble à la fois distant et un peu trop proche du nôtre. Que peut-on apprendre de ses positions politiques, de ses espoirs et de ses tourments, alors que nous vivons à notre tour la montée du fascisme, le spectre d’une destruction totale et que nous assistons, impuissantes, à la multiplication des guerres, des crimes de masse et des persécutions ?
Nous oublions [ce qui se passe à l’extérieur], pour ne pas céder à la peur. (…) Nous ne nommons réalité que ce que nous pouvons toucher du doigt, ce qui nous concerne directement, et nous nions la violence du feu alors que la maison voisine est déjà en flammes, tant que la nôtre ne l’est pas. C’est la guerre dans d’autres pays ? À douze heures, douze semaines seulement de nos frontières ? Dieu nous préserve !
« Où est la terre des promesses », Annemarie Schwarzenbach, éd Payot, 2002, p42, cité dans « Annemarie Schwarzenbach, La quête du réel », textes choisis, présentés et traduits par Dominique Laure Miermont et Nicole Le Bris, éd La Quinzaine Littéraire – Louis Vuitton, 2011, p.13
Embarquez donc, aux côtés d’Annemarie Schwarzenbach, à bord d’une Ford poussiéreuse pour un voyage qui vous semblera parfois lumineux et parfois d’une cruauté insoutenable. J’espère qu’il vous permettra de redécouvrir Annemarie et de dissiper à jamais l’image de l’aristocrate décadente, un peu vaine, partie dans des contrées lointaines contempler, avec des langueurs de princesse déchue, le vide de son existence que lui renvoyaient les étendues désertiques qu’elle traversait.
Ma Très Chère, durant notre voyage, n’éprouvez aucune crainte. L’errance d’Annemarie n’aura pas été vaine, et ses souffrances ne seront pas tues. Souvenez-vous, comme une consolation, que nous sommes, chacune à notre façon, l’adieu au passé et le nouveau départ d’un périple qui nous dépasse toutes et qui se poursuit bien au-delà de notre existence terrestre.
Depuis bien des jours – oui, combien de jours se sont déjà écoulés depuis la fin de ce voyage ? – j’essaie de dire avec les mots, – que le regard amoureusement dirigé vers l’obscurité, la réflexion, ce voyage à travers une longue nuit, est certes inconcevable et difficile à supporter, – mais pas différent de l’intrépide promesse du prochain départ. Je ne trouve pas le mot, mon cœur – et je dois maintenant poser la plume. Te souviens-tu de cette route du Nord qui, droite et luisante comme une flèche, s’élançait toujours en avant, à travers d’incessants crépuscules ?
« Les Quarante Colonnes du souvenir », préface, écrite par Nicole Le Bris, Esperluète Editions, 2008, p.102
SOMMAIRE
Sur la route avec Annemarie Schwarzenbach, épisode I (Enfance et études)
Sur la route avec Annemarie Schwarzenbach, épisode III (Klaus et Erika Mann, le début de l’errance, le journalisme)
Sur la route avec Annemarie Schwarzenbach, épisode IV (Les États-Unis, le Congo et le retour fatal en Suisse)
Avertissement : cet article est plus difficile à lire que les précédents. Voici une liste des sujets abordés : violences intrafamiliales, violences médicales extrêmes, internement forcé, toxicomanie, dépression, tentative de suicide, violences sexuelles
BIBLIOGRAPHIE
Biographies :
« Maman, tu dois lire mon livre, Annemarie Schwarzenbach, sa mère et sa grand-mère », écrit par Alexis Schwarzenbach, éd. Les éditions Métropolis, 2007
« Annemarie Schwarzenbach ou le mal d’Europe », écrit par Dominique Laure Miermont, éd Payot, 2004
Reportages :
« Annemarie Schwarzenbach, De monde en monde », reportages, 1934-1942 », Introduction de Nicole Le Bris, Arthaud Poche, 2018
« Annemarie Schwarzenbach, La quête du réel », textes choisis, présentés et traduits par Dominique Laure Miermont et Nicole Le Bris, éd La Quinzaine Littéraire – Louis Vuitton, 2011
Romans et nouvelles :
« Voir une femme », d’Annemarie Schwarzenbach, introduction de Étienne Barilier, postface d’Alexis Schwarzenbach, éd Metropolis, 2008
« Nouvelle lyrique », d’Annemarie Schwarzenbach, postface de Jean-Yves Masson, éd Verdier, 2016
« La Vallée heureuse », d’Annemarie Schwarzenbach, postface écrite par Charles Linsmayer, éd. de l’Aire, 1991
« La mort en Perse », d’Annemarie Schwarzenbach, préface de Dominique Laure Miermont, éditions Payot & Rivages, 1997
« Les Quarante Colonnes du souvenir », d’Annemarie Schwarzenbach, préface de Nicole Le Bris, Esperluète Editions, 2008
Correspondances :
« Lettres à Claude Bourdet », édition établie, traduite et annotée par Dominique Laure Miermont, éd. Zoé, 2008
« The letters of Annemarie Schwarzenbach and Carson McCullers: An Aesthetic Solidarity », edited by Susanne M Winterling, in collaboration with Vivian Ziheri, éd Kunstverein Publishing, 2014
Photo illustrant l’article : Annemarie Schwarzenbach, Ford auf iran. Strasse vor Meshed, 1939-1940, Bibliothèque nationale suisse, SLA-Schwarzenbach-A-5-19/140
- Roger Martin du Gard avait écrit la dédicace suivante dans l’un de ses livres, destinée à Annemarie : « Pour Annemarie – en la remerciant de promener sur cette terre son beau visage d’ange inconsolable ». Source : postface de Charles Linsmayer, dans « La Vallée heureuse », d’Annemarie Schwarzenbach, éd. de l’Aire, 1991,p.134 [↩]
- Témoignage issu du documentaire « Une Suisse rebelle, Annemarie Schwarzenbach », un documentaire réalisé par Carole Bonstein, écrit par Nasser Bakhti, Carole Bonstein et Daniel Gibel, produit par Troubadour Film, 2000 [↩]
- Pour le récit de la mort d’Annemarie, voir : « Annemarie Schwarzenbach ou le mal d’Europe », écrit par Dominique Laure Miermont, éd. Payot, 2004, p.369 à 374 ou la postface de Charles Linsmayer dans « La Vallée heureuse », d’Annemarie Schwarzenbach, éd. de l’Aire, 1991 [↩]
- Renée Vivien, dans le recueil « Sillages », éd. E.Sansot et Cie, 1908 p. 52-53 [↩]
- « L’Imaginaire du féminin dans l’œuvre de Renée Vivien », écrit par Marie-Ange Bartholomot Bessou, éd. Presses Universitaire Blaise Pascal, 2004 [↩]
- « L’Imaginaire du féminin dans l’œuvre de Renée Vivien », écrit par Marie-Ange Bartholomot Bessou, éd. Presses Universitaire Blaise Pascal, 2004, p.132 [↩]
- « L’Imaginaire du féminin dans l’œuvre de Renée Vivien », écrit par Marie-Ange Bartholomot Bessou, éd. Presses Universitaire Blaise Pascal, 2004, p.26 [↩]
- « Enseignement », de Renée Vivien, dans le recueil « Sillages », éd. E. Sansot et Cie, 1908, p. 102-104 [↩]
- « Annemarie Schwarzenbach, De monde en monde », reportages, 1934-1942, Introduction de Nicole Le Bris, Arthaud Poche, 2018, p.266 [↩]
- Lettre à Erika Mann du 19 août 1931, citée dans la postface écrite par Charles Linsmayer, de « La Vallée heureuse », d’Annemarie Schwarzenbach, publié en 1991 aux éditions de l’Aire, p.156 [↩]
- Lettre à Klaus Mann du 1er août 1940, citée dans la postface écrite par Charles Linsmayer, de « La Vallée heureuse », d’Annemarie Schwarzenbach, publié en 1991 aux éditions de l’Aire, p.156 [↩]
- « Nouvelle Parisienne II », cité dans « Annemarie Schwarzenbach ou le mal d’Europe », écrit par Dominique Laure Miermont, éd Payot, 2004, p.52 [↩]
- Lettre à Charly Clerc, du 7 avril 1940, citée dans la préface, écrite par Nicole Le Bris, du livre d’Annemarie Schwarzenbach Les Quarante Colonnes du souvenir, Esperluète Editions, 2008, p.13 [↩]
- Postface, écrite par Charles Linsmayer, de « La Vallée heureuse », d’Annemarie Schwarzenbach, publié en 1991 aux éditions de l’Aire, p.154 [↩]
- « Annemarie Schwarzenbach, De monde en monde », reportages, 1934-1942, Introduction de Nicole Le Bris, Arthaud Poche, 2018, p.13 [↩]
- « Annemarie Schwarzenbach, De monde en monde », reportages, 1934-1942, Introduction de Nicole Le Bris, Arthaud Poche, 2018, p.14 [↩]
- « Annemarie Schwarzenbach, La quête du réel », textes choisis, présentés et traduits par Dominique Laure Miermont et Nicole Le Bris, éd La Quinzaine Littéraire – Louis Vuitton, 2011, p. 77-78 [↩]
- Extrait d’un texte écrit par Arnold Kübler en hommage à Annemarie Schwarzenbach en mars 1943, publié dans « Annemarie Schwarzenbach, De monde en monde », reportages, 1934-1942, Introduction de Nicole Le Bris, Arthaud Poche, 2018, p.397 [↩]