Nue comme un ver, Réva grelottait de froid. L’odeur de cendre et de pierre humide qui régnait dans l’arrière-cuisine lui donnait la nausée. Ses pieds étaient plantés dans une bassine d’eau à peine tiède. Face à elle, mestra Uriel la dominait de toute sa hauteur, l’air courroucé et les bras croisés sur la poitrine. La gouvernante était vêtue d’une robe à corsage cintré, simple mais rehaussée de quelques rubans. Pour ne pas croiser son regard sévère, Réva fixait le lourd trousseau de clés qui pendait à sa ceinture.
— Frotte plus fort, Hilde, ordonna mestra Uriel. Il faudra bien ça pour enlever toute cette crasse…
La servante s’exécuta sans tarder. Réva serra les dents sous les assauts de la brosse rêche qui lui brûlait la peau.
— Mestra, la petite tremble, protesta timidement Hilde. L’eau est trop froide.
— C’est bien assez chaud comme ça, répondit mestra Uriel avec un sourire cruel. Ces Bégars sont aussi résistants que la vermine. Celle-ci peut bien supporter un peu d’eau froide, crois-moi.
— Elle vient tout juste de se relever de ses fièvres. Si elle tombe de nouveau malade, la maîtresse sera furieuse.
Le sourire de la gouvernante s’effaça. Elle jeta à Hilde un regard noir qui lui fit regretter d’avoir ouvert la bouche.